De qui se moque-t-on ?
Pendant des années, gouvernements après gouvernements, de droite comme de gauche, l’hôpital public a été mis à mal : les petits hôpitaux ont fermé pour laisser place aux « pôles hospitaliers d’activités », les maternités ont fermé, des postes ont été supprimés, des lits fermés, les budgets octroyés selon les actes tarifés (la tarification à l’activité T2A – Tarification à l’acte). L’hôpital public a été saigné sur l’autel de la privatisation du système de santé et la casse des services publics…Et maintenant ?
Alors que les urgences ont été plusieurs fois en grève depuis le printemps dernier, que les personnels hospitaliers, tirent la sonnette d’alarme depuis des mois, que des responsables de services démissionnent symboliquement… l’État et ses sbires, toute honte bue, osent saluer « les soignant-es », oubliant au passage les adminsitratif-ves de l’hôpital dont on ne parle jamais, alors qu’ils-elles sont tout autant exposé-es…)
« Nous sommes en guerre » martèlent Macron, Philippe, Castaner et compagnie. Et la guerre, c’est bien pratique ; elle permet d’appeler d’un ton grave et martial à l’unité nationale face à un ennemi invisible. Ca nous rappelle la rhétorique lors de l’état d’urgence après les attentas de 2015, et à nouveau, nous vivons une restriction de nos libertés.
Les confiné-es et les non-confiné-es :
Nous saluons les non-confiné-es, ces travailleurs et travailleuses de la santé, de la poste, du transport, des collectivités territoriales, de l’enseignement, des impôts, de l’alimentation, du médico-social, du nettoyage… qui vont « au front », pour rester dans la métaphore guerrière du « président des riches ». Elles/ils continuent à travailler, volontairement par solidarité, ou par obligation faite par l’employeur. Souvent sans protection : absence de masques, de gants, impossibilité de respecter la distance des 1 m… le virus a encore de beaux jours devant lui face à toutes ces injonctions paradoxales ! « Restez chez vous mais… continuer à travailler car la vie économique ne doit pas s’arrêter ».
La coupe est pleine. Les salarié.es sont de plus en plus nombreuses et nombreux à exercer leur droit de retrait ou à se mettre en grève dans les secteurs où le télétravail n’est pas possible. Leur sécurité au travail n’est pas assurée. Qu’à cela ne tienne : LREM vient de rejeter en commission un amendement qui aurait contraint les employeurs à s’assurer que leurs salarié-es aient à disposition le matériel de protection nécessaire contre le Coronavirus.
N’oublions pas non plus, dans cette France de la Macronie, les personnes les plus vulnérables au sujet desquelles le gouvernement ne dit pas un mot : précaires, familles monoparentales, sans papiers en centres de rétention administrative, prisonniers, SDF….mais aussi les femmes et enfants qui vivent avec des compagnons violents, les femmes seules avec des enfants, car ce sont les femmes qui sont en première ligne dans les foyers.
Les pleins pouvoirs :
Macron et son monde, habité par le MEDEF, souhaitent instaurer un «projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19» qui permet d’habiliter le gouvernement à légiférer par ordonnances. Ils sont en train de s’octroyer les pleins pouvoirs, ils pourront ainsi remettre en cause durablement les droits des salariés, notamment en matière de congés payés, de réduction du temps de travail, de repos hebdomadaire, de liberté de réunion ou encore le droit de grève comme au Portugal. Nul besoin de passer par le parlement, nul besoin d’avis de « scientifiques », à présent, Macron, son premier ministre et son ministre de la santé pourront déclarer un état d’urgence sanitaire sans garde fous. Pourtant la loi de 1955 qui a instauré la première l’état d’urgence en France, pendant la guerre d’Algérie, précise bien que le Parlement doit être réuni dans la foulée. La version Macron s’en dispense…Trois personnes auront droit de nous priver de nos libertés les plus fondamentales sous prétexte d’urgence. N’oublions pas le 4ème larron, le ministre de l’intérieur, connu pour son engagement sans faille dans la répression des luttes et manifestations depuis sa prise de fonction. Il est là pour maintenir l’ordre nécessaire au patronat et à l’État, pour contraindre le peuple, y compris par des sanctions et la répression, dans cette situation « hors-norme ».
Situation qui est la conséquence évidente de toutes les politiques d’austérité antérieures et actuelles de destruction des services publics et des solidarités, du mépris de la planète, du manque d’anticipation et de prévoyance et d’une volonté aveugle de continuer à faire du profit à tout prix !
Nous reprendrons la rue :
Quand cette crise sanitaire sera derrière nous, la crise économique et sociale sera toujours là. La rue sera à nouveau à reprendre… Alors dès à présent, développons toutes les formes de solidarités possibles, reprenons nos vies sans leurs profits, que cette crise sanitaire ne soit pas la fin de nos libertés mais la fin de leur monde.
En attendant, solidaires de nos camarades et des personnels de santé et de toutes celles et ceux qui continuent à travailler, nous avons pris la décision de fermer nos locaux de Babinet pour ne pas prendre et faire prendre de risques inutiles à qui que ce soit. Les dernières réunions prévues, dont l’AG commune interpro, ont été reportées jusqu’à nouvel ordre. Pour la suite, on verra en fonction de l’évolution de la situation.
Et dès maintenant, comme nous y appelle l’Union Nationale Solidaires, «nous continuerons à combattre les politiques régressives : réforme de l’assurance chômage, réforme des retraites…et à refuser la répression et les violences policières. Nous demandons le même déploiement de moyens pour faire face à l’urgence sociale et écologique. Ni coronavirus, ni union sacrée, la lutte continue contre tout ce qui détruit nos existences. Solidarité avec les victimes du coronavirus, solidarité avec toutes celles et ceux que ce système attaque ; indéfectiblement. La lutte ne s’arrêtera pas avec la maladie. Nos combats pour un monde où la solidarité, la protection sociale et les services publics sont les meilleurs remparts contre les fléaux et l’injustice, sont plus que jamais légitimes ».
Solidaires 31 le 24 mars 2020