En déplacement à Gaillac, dans le Tarn, jeudi 9 juin, Emmanuel Macron a été interpelé par une lycéenne. Laura, 18 ans, a rappelé au Président qu’il avait annoncé la lutte contre les violences faites aux femmes comme la grande cause du quinquennat puis a demandé : « En attendant, vous mettez, à la tête de l’État, des hommes qui sont accusés de viol et de violences contre les femmes. Pourquoi ? ». La jeune femme faisait référence à Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur visé par une plainte pour viol, et Damien Abad, récemment nommé ministre des Solidarités et accusé de violences sexuelles. Emmanuel Macron a répondu lapidairement à la lycéenne, invoquant notamment la présomption d’innocence.
Le lendemain matin, alors qu’elle était en plein cours, Laura a été sortie de classe par l’administration de son lycée pour lui demander si elle acceptait de s’entretenir avec des gendarmes. L’entretien a duré une dizaine de minutes, les gendarmes lui ont d’abord demandé si elle souhaitait porter plainte pour les faits d’agression qu’elle avait évoqués publiquement la veille. Mais rapidement, la conversation a porté sur les propos que la jeune femme avait tenus la veille, lui reprochant d’avoir interpelé le président lors de son bain de foule plutôt que d’avoir envoyé un courrier à l’Élysée.
Certes, la gendarmerie s’est excusée, justifiant son intervention par l’accompagnement des victimes. Mais ces excuses ne justifient pas une intervention dans le lycée qui amène à sortir une élève de cours et à la sermonner en lui disant que « ce n’était pas à faire » et lui expliquant qu’il existait des « voies hiérarchiques » pour s’adresser au Président.
Nous ne sommes pas dupes : qu’il s’agisse d’un excès de zèle de ces deux gendarmes ou qu’ils aient suivi des ordres, il s’agit bien là d’une tentative d’intimidation, dans la ligne des pratiques autoritaires et répressives qui caractérisent la présidence de M. Macron.
Concernant la réponse succincte du Président, l’utilisation de la présomption d’innocence pour justifier la présence dans le gouvernement de ministres accusés de viol ou d’agressions sexuelles est problématique. En effet M. Macron déclare « Je suis pour la libération de la parole et je l’ai accompagnée […] mais en même temps pour fonctionner en société vous devez avoir de la présomption d’innocence ». La présomption d’innocence est en effet un acquis important dans le droit, mais dans le cas des violences sexistes et sexuelles, elle est bien souvent détournée de manière sexiste pour empêcher la libération de la parole.
On ne pourra jamais contribuer à libérer la parole des victimes et à faire reculer les violences sexistes et sexuelles si l’on utilise la présomption d’innocence pour mettre en doute, a priori, la sincérité de la victime. C’est la raison pour laquelle il est important de rappeler la présomption de sincérité. Cela ne s’oppose aucunement au respect de la présomption d’innocence qui joue sur le plan juridique alors que la présomption de sincérité joue sur le plan social.
SUD Éducation partage l’incompréhension et la colère d’enseignant·es, de parents d’élèves et de lycéen·nes, interloqué·es que l’on puisse tirer une élève de sa classe pour répondre à des gendarmes.
SUD Éducation demande à M. Macron de répondre à la question posée par Laura : « Vous mettez, à la tête de l’État, des hommes qui sont accusés de viol et de violences contre les femmes. Pourquoi ? »
SUD Éducation demande la démission des ministres accusés de viol et de violences sexistes ou sexuelles.
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